«La limitation drastique de l'école à la maison est un coup porté aux libertés» - Le choix de l'exécutif de soumettre l'instruction à domicile à autorisation préalable revient à une interdiction déguisée, argumente, dans son livre, Jean-Baptiste Maillard, secrétaire général de «Liberté éducation».
LE FIGARO. - Le Conseil constitutionnel a donné son feu vert à la loi «séparatisme». Il faudra désormais une autorisation préalable de l'État pour instruire son enfant à domicile. Et les motifs permettant de l'obtenir seront limités, malgré une réserve d'interprétation du Conseil constitutionnel. Pourquoi est-ce selon vous un «coup porté à la démocratie» ?
Jean-Baptiste MAILLARD. - Les parents sont les premiers éducateurs de leur enfant. Dès lors qu'on refuse ce principe, comme le fait le gouvernement, on met le doigt dans un engrenage tout sauf démocratique. Je note que les pays ayant le plus restreint l'école à la maison sont la Chine, Cuba, l'Arabie saoudite et le Pakistan. À l’inverse, des pays comme l'Irlande ont inscrit le droit de choisir l'instruction en famille dans leur Constitution.
Sous couvert d'une idéologie selon laquelle rien ne doit exister en dehors de l'institution scolaire, l'exécutif va à l'encontre d'un certain nombre de conventions internationales : la Convention internationale des droits de l'enfant, mais aussi la Déclaration universelle des droits de l'homme qui explique qu'il appartient aux parents de choisir l'éducation de leurs enfants.
Comme l'ont affirmé une vingtaine de chercheurs internationaux, spécialistes de l'instruction en famille, dans une lettre ouverte au magazine Other education, l'instruction en famille démontre clairement la force d'une démocratie.
Les chercheurs français les plus éminents en matière de radicalisation m'ont tous répondu qu'il n'existait aucun chiffre sur la radicalisation dans le cadre de l'école à la maison.Jean-Baptiste Maillard
L'autre problème, ce sont aussi les raisons invoquées par le gouvernement. Lors de son discours des Mureaux le 2 octobre 2020, Emmanuel Macron a annoncé sa décision de restreindre l'école à la maison dans le cadre de la lutte contre le fondamentalisme. Or, cela ne s'appuie sur aucun fondement. J'ai passé de nombreux jours à interroger les chercheurs français les plus éminents en matière de radicalisation et tous m'ont répondu qu'il n'existait aucun chiffre sur la radicalisation dans le cadre de l'école à la maison. Ce constat est partagé par un haut fonctionnaire à la tête de l'Institut des hautes études du ministère de l'Intérieur.
Un projet d'avis du Conseil d'État, auquel Le Figaro a eu accès, concluait à l'inconstitutionnalité de l'article sur l'instruction en famille. La version définitive a été sensiblement modifiée. Vous vous interrogez sur ce revirement.
Source : lefigaro.fr
Découvrir la suite de l'article sur le site d'origine
L'instruction sera soumise à autorisation (mais pas encore à la rentrée 2021). Les raisons permettant de demander cette autorisation seront limitées. Il ne sera possible de demander une dérogation que pour l’état de santé de l’enfant, son handicap, la pratique d’activité sportive ou artistique intensive, l’itinérance de la famille en France ou encore un éloignement géographique de tout établissement scolaire public. Il faudra aussi prouver « que les personnes qui en sont responsables justifient de la capacité de la ou des personnes chargées d’instruire l’enfant ».
Le texte voté par l'assemblée nationale prévoit une période de transition jusqu’à l’année scolaire 2024-2025, sous réserve de contrôles, « pour les familles qui pratiquent déjà l’instruction en famille et pour lesquelles ce mode d’instruction ne sert pas à des pratiques séparatistes ». Des contrôles devraient donc être organisés chez ceux qui pratiquent déjà l’instruction en famille, pour vérifier que « ce mode d’instruction ne sert pas à des pratiques séparatistes » et autoriser sa poursuite pendant les deux années suivantes.